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Essai MG ZS EV : au bal masqué

MG se relance en Europe avec le ZS EV, un SUV électrique qui mise sur son tarif ultra agressif de 29 990 € pour séduire. Mais derrière le masque se cache parfois un visage inattendu.

En 2010 entrait en vigueur une loi qui interdit la dissimulation de visage dans l’espace public. En 2020, sortir en public sans se couvrir la bouche et le nez vous vaut des regards accusateurs et est même passible d’amende dans les transports en commun. Qui aurait pu s’y attendre ! En tout cas, il y en a un qui a bien compris le message. MG, constructeur anglais historique, revient sur le devant de la scène pile au moment où cacher son faciès est recommandé pour ne pas s’attirer des ennuis. Et derrière son masque « So British » se cache en réalité le groupe chinois SAIC (Shanghai Automotive Industry Corporation), un géant qui n’est rien de moins que le premier constructeur automobile en Chine. La stratégie de la marque pour venir se faire une place en Europe est relativement simple, puisqu’il s’agit de miser sur l’électrique et de débarquer avec des tarifs extrêmement compétitifs. L’intention est louable, mais le dragon asiatique semble avoir oublié une étape dans le processus : il ne suffit pas de coller un blason européen sur une auto pour la rendre européenne.

Souplesse inquiétante

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On dit souvent que le marché européen est l’un des marchés les plus exigeants car les clients en attendent beaucoup de leurs autos. Et c’est vrai : quand on voit la qualité de beaucoup de produits français, allemands ou anglais, on se dit que le niveau est plutôt relevé. Même les italiens, autrefois fréquemment qualifiés « d’artisanaux » dans la presse spécialisée, produisent aujourd’hui des autos tout à fait recommandables. Alors quand on découvre un produit qui ne nous était pas initialement destiné (le MG ZS est commercialisé en Chine en version thermique depuis 2017) mais qui nous est tout de même parvenu sans grands changements sur le fond, forcément, la surprise est de taille. Lors de mes premiers tours de roue en ville, j’ai trouvé la suspension d’un confort étonnant, que j’ai de prime abord mis sur le compte d’un grand débattement et de pneus à flancs hauts. Puis est venu le premier ralentisseur et j’ai vite découvert le revers de la médaille : l’avant encaisse sans trop broncher, ok, mais l’arrière rebondit deux fois avant de se stabiliser. Si c’est aussi mou et flagrant à 20 km/h, il y a de quoi s’inquiéter pour la suite… Et en effet, une fois sur le réseau secondaire, la sentence tombe : au premier virage pris 10 km/h en dessous de la limite autorisée, le ZS EV s’écrase sur ses appuis et oscille sans vraiment se caler, tandis que son train arrière danse la gigue au gré des bosses. Le tout avec une direction floue qui n’aide pas à sentir l’adhérence disponible et dont la consistance est quasi inexistante. C’est simple, hormis le roulis prononcé, on ne sent rien à bord du SUV, sauf que ce dernier déplace bel et bien ses plus de 1,4 tonnes sur la route et que le poids a tôt fait d’embarquer le bestiau qui sature alors le grip de ses pneus, pourtant d’honnêtes Michelin Primacy 3. En cas d’évitement à plus de 80 km/h, l’ESP sera le seul rempart sur lequel compter pour éviter le pire et empêcher l’auto de faire des embardées.

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C’est dommage d’avoir gardé des amortisseurs aussi faiblement tarés (surtout à l’arrière), d’autant que la partie moteur électrique est pour sa part bien maîtrisée. Les relances sont expéditives, l’accélération franche et le SUV n’est pas trop gourmand même quand on le sollicite, avec une moyenne en-dessous de 19 kWh/100 km relevée lors de notre essai. Honnête pour un modèle assez haut sur pattes de 4,31 m de long et frôlant la tonne et demie. MG annonce 263 km d’autonomie en WLTP grâce à la batterie de 44,5 kWh et il semble tout à fait possible de s’en approcher en jouant le jeu d’une conduite économique. Pour ce qui est de la recharge, la voiture accepte jusqu’à 85 kWh, ce qui permet de passer de 0 à 80 % de charge en environ trois quart d’heure. Et sur la route, le SUV dispose bien sûr d’un freinage régénératif dont l’intensité est réglable sur trois niveaux (impossible de le couper vraiment, ce qui exclu toute roue libre). Il n’y a toutefois pas de mode de conduite qui utilise une seule pédale, ce qui signifie que même si le véhicule freine dès qu’on relâche l’accélérateur, il ne va pas jusqu’à l’arrêt complet, comme le fait une Nissan Leaf par exemple.

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Avantages en nature

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Pour ce qui est du design intérieur comme extérieur, MG l’a joué très consensuel et son ZS s’inspire de beaucoup d’autres modèles à la fois, sans offrir une personnalité forte et vraiment marquée. En somme, le SUV sino-anglais est plutôt bien proportionné et pas déplaisant à l’œil, mais il ne sort pas du lot. La qualité des matériaux est légère dans l’habitacle, les assemblages sont juste correctes, l’écran tactile (pourtant compatible CarPlay et Android Auto) est d’une lenteur inconnue de tout autre modèle récent sur le marché, la sono est assez médiocre… En bref, vous n’avez que ce pour quoi vous payez. Le ZS EV est une porte d’entrée vers l’électrique, mais il ne faut pas attendre de lui qu’il concurrence vraiment des modèles comme le bon Kia e-Niro ou encore le récent Peugeot e2008. Tous deux sont sensiblement plus chers mais la différence est pleinement justifiée tant ils sont infiniment plus aboutis. Il y a bien la possibilité d’opter pour une finition Luxury (31 990 €), qui ajoute entre autres un toit ouvrant, des jantes de 17 pouces et des sièges chauffants, mais même ainsi gréé, le SUV reste relativement bas de gamme.

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Pour donner de l’attrait à son produit, MG met en revanche le paquet sur les services annexes, et propose une offre de lancement franchement attrayante pour se convertir à l’électrique : le constructeur offre une Wallbox et son installation au domicile du client, ainsi qu’une carte de recharge Chargemap créditée de l’équivalent d’un an de consommation électrique. De quoi permettre aux propriétaires de rouler de manière totalement gratuite les premiers mois ! Mais le défi à relever semble colossale pour le constructeur anglais made in China. Avec un seul point de vente physique en France, situé à Paris, il mise en premier lieu sur son site internet pour passer commande et demander un essai. Sauf que sans réel lien entre le MG d’hier et celui d’aujourd’hui, et surtout sans justification d’utilisation de la marque autre qu’une pure tentative marketing de capter l’intérêt de ceux pour qui l’appellation Morris Garages évoque un glorieux passé, il va falloir se lever tôt pour amener du monde à s’intéresser au produit. J’y crois en ville, où le ZS EV pourra séduire par son sens pratique, son confort et par la souplesse de l’électrique, mais beaucoup moins en dehors de la cité où son comportement manque cruellement de rigueur. SAIC n’est pas dupe et essaye d’entretenir le mythe en présentant parfois une ou deux études de style de coupé ou de roadster badgées MG, histoire de capter l’attention. Mais réalistiquement, ces croquis ont a peu près autant de chances de se traduire un jour en modèle de série que vous ou moi de gagner le jackpot de l’Euromillion. Comme quoi, même en avançant masqué, l’illusion ne fonctionne vraiment que pour celui qui veut bien y croire !

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Jalil Chaouite

Jalil Chaouite

Tant que ça roule, ça me plait... Ou presque. En tout cas je suis toujours curieux d'essayer tout ce que je peux, pour multiplier les points de comparaison. Je mentirais si je disais que je ne préfère pas une sportive à une banale citadine, mais je mets un point d'honneur à aborder chaque nouvel essai avec la même neutralité. Mes avis sont en général très tranchés, mais je ne suis jamais fermé à la discussion ! Bonne lecture :)

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